Benjamin Gibert, Directeur de l’équipe de recherche Gastroentérologie et technologies pour la santé au Centre de Recherche en Cancérologie de Lyon, nous parle du projet THERANET :
Vous avez obtenu un financement via le programme Preuve du Concept du CLARA. Pouvez-vous décrire l’objectif du projet ?
Nous avons eu la chance d’être lauréats du PDC CLARA en 2019, avec un financement alloué par la Région Auvergne-Rhône-Alpes. L’objectif général du projet était de créer de nouvelles molécules anticancéreuses basées sur l’émission de radioactivité, et capables de « la délivrer » spécifiquement de manière sélective dans les tumeurs afin de les détruire. On parle dans ce cas de radiothérapie interne vectorisée (RIV). Cette technologie est déjà utilisée en routine clinique pour traiter les tumeurs neuroendocrines et les cancers de la prostate métastatiques. Elle semble très efficace avec de gros efforts de recherche et développement, et des rachats importants de start-up par de très grosses entreprises pharmaceutiques.
Dans notre cas, nous avons radio-marqué des anticorps entiers afin de mener des études d’imagerie diagnostic et de thérapie (cf : Kryza D, et al., EMBO Mol Med. 2023 doi: 10.15252/emmm.202216732). Ces travaux sont le fruit d’une importante collaboration avec plusieurs chercheurs, radiopharmaciens et médecins.
Quel est l’impact attendu pour votre équipe de recherche ? Quel impact à l’échelle de votre institution et de la région (financements obtenus, création d’emplois dans l’entreprise…) ?
Ce financement a eu un impact majeur pour notre groupe de recherche. Il a notamment permis la création d’une équipe au sein du CRCL, ce qui constitue en soi un aboutissement, et dans laquelle nous essayons de développer cette activité alliant radioactivité et thérapie anticancéreuse.
De manière plus générale, nous avons pu développer une activité qui requiert une expertise de pointe dans l’utilisation de la radioactivité à des fins médicales. Cette expertise est déjà très présente au sein des services de médecine nucléaire des Hospices civils de Lyon (HCL) et du Centre Léon Bérard (CLB).
Les bases scientifiques posées grâce au programme PDC CLARA ont permis l’obtention d’une chaire industrielle d’une valeur de 2 M€ délivrée par l’ANR et la société Orano. Cette société, basée en France, produit des éléments radioactifs essentiels pour la santé. Nous avons caractérisé des protéines de surface cellulaire qui sont très spécifiques des cellules cancéreuses, et nous cherchons à leur « adresser » différents métaux innovants afin de les détruire. Ce domaine regorge d’innovations, car les métaux ont des propriétés particulières. Nous nous focalisons sur les éléments dits alpha et à effet Auger. Notre partenariat sera étendu à l’avenir grâce à une collaboration vertueuse alliant la solidité d’un grand groupe (16 000 salariés) et l’agilité d’une équipe académique. Orano détache des chercheurs dans notre équipe avec laquelle nous coconstruisons désormais l’ensemble de nos projets.
En quoi ce soutien a-t-il été bénéfique pour le projet ? Quelles sont les suites envisagées ?
Comme évoqué précédemment, ce projet a permis de structurer différents acteurs et financeurs qui nous apportent un soutien important depuis lors. Notre projet a ainsi reçu un soutien fort de l’ensemble de nos tutelles (Centre Léon Bérard, CNRS, INSERM, Université Lyon 1), mais aussi des Hospices Civils de Lyon (HCL), qui nous apportent un appui majeur en nous faisant bénéficier d’un apport en personnel conséquent.
Nous pensons que ces technologies vont se développer à très court terme et que la France, pays de Marie Curie, a des atouts indéniables pour devenir leader dans ce domaine. Il est à noter que dans le domaine de la médecine nucléaire en général, les acteurs européens sont bien mieux placés que les Américains et les autres acteurs mondiaux. En nous concentrant sur nos forces économiques et scientifiques, nous pensons accroitre ce leadership.